30 décembre 2017

affiches de films sur les Présidents : les codes graphiques

Dans quelques jours sortent deux films, El presidente et Les heures sombres — vous savez, le genre de films où un grand comédien incarne un grand chef politique. Voici un petit florilège d'affiches de ce genre cinématographique, qui montre comment elles obéissent à des codes bien établis : du noir & blanc bien contrasté pour la sévérité et la rigueur ; du rouge parce que bien sûr les actes politiques sont des choix humains, qui impliquent toujours du sang versé. Des lignes droites, des cadres, du rigide. Et des profils forts et songeurs, qui expriment le doute et la solennité. Faut pas déconner, ces mecs portent le monde sur leurs épaules.
L'affiche qui tranche vraiment, qui ne reprend aucun de ces codes, c'est celle de The lady, un film sur la vie de Aung San Suu Kyi. Mais tout s'explique : c'est une femme ! Du coup, il y a même un sourire qui se dessine sur le visage de cette présidente (oui parce que les femmes, c'est doux, c'est souriant).
D'autres affiches sont conçues avec des couleurs, mais pour des comédies, comme celui sur Roosevelt qui narre surtout ses histoires de fesses.

26 décembre 2017

l'ONG 'Bibliothèques Sans Frontières' : progrès social ou dévoiement de la cause humanitaire ?

L'ONG 'Bibliothèques Sans Frontières', association humanitaire subventionnée par du mécénat privé et par le public, fonctionne sur une stratégie ultramarketée. Une stratégie qui lui permet d'exister partout en usant de nombreux soutiens politiques, médiatiques et institutionnels. L'association mène aussi des opérations visibles avec les Ideas box. Elle multiplie par ailleurs les partenariats, à tel point qu'on se demande si l'objectif penche vers l'affichage ou vers l'action sur le terrain... Alors BSF est-elle un gros gadget médiatique ? 
Petite enquête.
 
Il n'est pas question de dénigrer une ONG sans en comprendre le discours et les objectifs ; il s'agit de nous interroger, de faire preuve de vigilance, même si BSF semble actuellement jouir d'un large consensus. Or, ayant rencontré BSF avec d'autres bibliothécaires, face au discours des porte-paroles de cette asso, j'ai constaté un certain embarras chez quelques collègues. BSF brouille les pistes, pas très au clair avec les objectifs éthiques, dévoie parfois les missions des bibliothèques, use de l'investissement des services publics sans "renvoyer l'ascenseur", jouit de tribunes médiatiques ; surtout, BSF n'aborde jamais les sujets des politiques publiques, les des moyens à mettre en œuvre pour la lecture publique et pour la démocratisation du savoir.
BSF est souriante, dynamique et affiche son action en faveur des réfugiés et dans les zones de conflits. En Haïti, au Burundi, au Nicaragua, auprès de communautés exclues ou en France temporairement auprès de migrants, BSF travaille à la reconstruction du lien social, fait des vidéos pédagogiques pour lutter contre les théories complotistes et mieux faire comprendre le monde. Alors quelle critique ? 
Pour une asso, le gage de crédibilité est vital. Les community managers et les chargés de com' de BSF l'ont rendue ultra-crédible. L'asso est animée par un historien — haut-fonctionnaire, ancien du PS et proche de ce parti — et par un ancien de Science-po. Ancrée dans les sphères d'influence, BSF sait solliciter les acteurs publics (leur temps, leur argent, leur organisation, leurs partenariats) pour se rendre visible. 
 
Dévoyer le concept de transformation sociale
Des nombreuses collectivités accueillent les conférences de BSF, accompagnent leurs chantiers et informent le public et les institutions sur leur action. On mobilise ainsi des collectivités, des bibliothécaires et des volontaires, mais ce n'est que BSF qui en récolte les fruits, c'est-à-dire qui attire les investisseurs. Les services publics sollicités, eux voient leur financement diminuer... BSF a-t-elle pour stratégie consciente de faire sa promo sur le dos des acteurs publics ? En attendant ces acteurs publics jouent le jeu parce que c'est pour la bonne cause, parce que c'est pour aider les enfants, pour émanciper l'humanité par le savoir et la lecture. Oui, on accompagne, parce que la bonne conscience a un prix et qu'il est plus commode de chasser le doute.
Parmi les actions, BSF milite pour une "transformation sociale". C'est un concept attrayant : même Emmanuel Macron, le Comptable de la république, souhaite une "transformation sociale". Or BSF n'explique pas le concept, qui vient de l'éducation populaire et qui vise à établir une justice sociale en modifiant l'ordre des pouvoirs. BSF ne parle pas non plus d'égalité sociale ni de transformation de la société. Et pour cause : BSF est hyperactive dans la diffusion des nouvelles technologies, la création de fab-lab et le coworking. Une stratégie dont l'efficacité, en termes d'émancipation et de liberté, est ...
BNF était présente au dernier congrès de l'ABF, faisant un écho enthousiaste aux propos de la ministre de la culture Françoise Nyssen pour ouvrir les bibs le dimanche. L'ONG prend pour modèle les pays anglo-saxons dont certaines ouvrent 20h/24h. Mais elle le fait de façon parfois mensongère, sans aborder les nouveaux besoins que cela suppose et sans parler moyens humains ni économiques. Le projet fait d'ailleurs débat ; un débat rare mais existant !