13 décembre 2011

Challenge

Challenges, magazine d'économie lu par les acteurs de l'économie, nous a proposé une belle couverture fin novembre. D'abord, en exergue du titre de cet hebdo, il y a cette question : "que dit l'économie cette semaine ?"
Pour rappel, l'économie est un concept très large qui rassemble la finance, le commerce, le monde bancaire et toutes sortes d'échanges monétaires (ou non). Autant dire qu'elle est aussi impalpable qu'impersonnelle. Alors quand elle nous "dit" quelque chose, on peut s'attendre à percevoir un ensemble de tendances, de rumeurs, un bruissement, sans personne pour l'incarner. Les lecteurs de Challenge sont donc invités à se fier à un mouvement général aussi arbitraire que le temps qu'il fait (genre "que nous dit la météo aujourd'hui ?")


Mais en couverture du N° 277, il y a une citation d' Alain Tavarella, président fondateur d'Altarea Cogedim (un gros machin gestionnaire de biens). Ce qu'il nous dit importe peu, (qu'en ce qui concerne l'immobilier "il n'y aura pas de baisse franche", mais bon, c'est normal, c'est tout ce qu'il peut souhaiter). Ce qui m'a fait réagir, c'est qu'il fait la Une pour édicter sa vérité. Là, tout à coup, il y a un visage, un nom, un propos personnel.
Et Challenges révèle ainsi une vérité pas forcément assumée : derrière l'économie, il y a des humains. Derrière un ensemble de tendances qu'on nous invite à suivre, il y a des acteurs, des experts qui donnent le "ton", des décideurs influents qui tentent d'imposer les tendances. Challenges rappelle aussi, involontairement, que l'on a le choix : prendre à la lettre les préconisations, les opinions personnelles de ces gens qui ont tout intérêt à gagner des billes... ou pas.

Je propose de changer la couv' et de lui faire dire "Challenges / que disent les pontes du commerce ?" Ce serait plus assumé.

2 décembre 2011

les touristes de Panurge


On les voit par troupeaux, massés sur les parcours obligés du tourisme international. Ils veulent tous prendre la MÊME photo, s'amusent tous de la MÊME mise en scène. Les touristes s'imaginent parfois qu'il faut adopter les gestes de tous les autres touristes pour réellement profiter de son séjour. On le voit ailleurs, dans ce montage du bisou au sphynx, cette tradition à laquelle on devrait céder quand on "fait" l'Egypte.

En passant par le Louvre, la gros des touristes ne déroge pas à la règle : la règle consiste à lever la main devant la pyramide du Louvre ; quelqu'un prend la photo et en jouant de la perspective, c'est comme si l'on posait la main sur la Pyramide ! alors chacun prend la pose, avec sur la figure la fierté insensée de ceux qui viennent de trouver une astuce géniale.

























12 novembre 2011

Culture pour chacun pour soi (3) – l’enterrement.



(Cet article fait suite à deux autres, sur la Culture pour chacun :

Le rapport « Culture pour chacun » publié en septembre 2010 fut rédigé par deux conseillers ministériels, (Guillaume Pfister et Francis Lacloche, qui pour l’occasion se firent valets de l’industrie culturelle). Il fut tellement critiqué par les acteurs des milieux culturels, par des personnalités politiques, par des citoyens en colère, qu’il est aujourd’hui caduc. Poubelle. Le Ministre de la culture Frédéric Mitterrand tenta, de noyer le poisson, de choyer les passions, par un autre projet appelé « culture pour tous, culture pour chacun, cultures partagées », sans gagner en crédibilité. 
Le Ministre est désormais vu comme un pantin sans idées viables, ayant pour principale préoccupation de redorer le blason de son portefeuille ministériel. Une tendance « qui a parfois conduit la Rue de Valois à trop se livrer aux seuls délices de la communication et à devenir un singulier ‘magistère de la culture’ », comme l’a dit dans le Figaro Jean-Jacques Aillagon, ancien ministre de la culture. Jacques Drillon dans le Nouvel observateur a vu en Frédéric Mitterrand l’incarnation de l’homo festivus, figure conceptualisée par Philippe Muray, et « une sorte de Paris-Plage fait homme ».

Le rapport pondu est plein ras la gueule de la doctrine libérale : les orientations culturelles de l’État devront servir le marché du divertissement et des loisirs. Comme on l’a vu, les auteurs du rapport se fondent sur des discours, des études, des rapports ministériels, des recherches universitaires... Sauf qu’ils n’hésitent pas à en dévoyer le propos, pour coller au plus près des préconisations des secteurs commerciaux (voir le rapport d’Elise Longuet).

29 juin 2011

qui sera la mieux voilée ?

Près de chez moi, les Juives et les Musulmanes viennent au parc avec leurs enfants et se mélangent, se fréquentent. C'est plutôt appréciable : elles peuvent ainsi rompre les préjugés qui règnent entre communautés.
Mais elles ne rompent pas avec les traditions rétrogrades et sexistes. Ceux qui appellent à la "tolérance" peuvent sourire béatement devant ces scènes : ces femmes se rejoignent même dans des coutumes débiles. Toutes cachent ce qui, d'après les textes bibliques, peut les rendre séduisantes, à savoir les cheveux. Elles viennent couvertes de foulards, de chandails, de tchador ou de hijab, au pire de niqab (de plus en plus nombreux dans mon quartier), au mieux d'énormes perruques, et là-dessus, elles semblent se comprendre.


Il doit y avoir, dans le coin, un concours local de la femme la mieux couverte aux yeux des hommes...

16 juin 2011

quand l'Etat récompense ses bons élèves

Sous Staline, les ouvriers modèles des grandes industries étaient récompensés par les honneurs. Le mineur du mois, le chaudronnier du mois, l'ajusteur du mois, etc. avaient leur photo à l'entrée de l'usine.
La France est un pays où, même quand la droite règne, on pratique l'écrémage parmi les travailleurs : on fait fonctionner le mérite à plein. L'État choisit les "bons élèves", selon le vocabulaire en vigueur actuellement, il fait honneur à ses favoris en les présentant comme des modèles.
C'est pas toujours à l'entrée de l'usine, mais même à l'entrée du Ministère de la culture, qu'on affiche la photo des nommés :

25 avril 2011

Marine Le Pen populaire chez les pauvres ?

Le Figaro.fr du 24 avril 2011  : "A moins d'un an de la présidentielle, Marine Le Pen caracole en tête d'un sondage Ifop * pour le Journal du Dimanche. Cette fois, elle est le choix préféré des ouvriers avec 36% d'intentions de vote dans cette catégorie de la population, contre 17% pour Dominique Strauss-Kahn et 15% pour Nicolas Sarkozy. (...) Dans le JDD, le directeur de l'Ifop, Frédéric Dabi, fait valoir qu'il s'agit là d'un «retour en arrière» : en 2007, Nicolas Sarkozy avait en effet réussi à récupérer le vote populaire..."
Le Figaro peut le clamer avec gourmandise, le FN c'est la faute des pauvres.
Les électeurs les plus exclus et les moins protégés par l'État sont souvent passé d'un vote de plébiscite (pour Sarko en 2007) à un vote de rejet (pour Le Pen en 2010). Le "retour en arrière", dont parle le quotidien de droite, c'est quoi ? c'est la progression des intentions de vote, ou c'est l'aggravation des politiques antisociales ?

15 avril 2011

Culture pour chacun pour soi (2) - comment on a élaboré la "doctrine"


Le rapport « Culture pour chacun », publié en septembre 2010 par le Ministère de la culture, entend répondre à la préoccupation suivante : « comment réduire l’éloignement entre population et culture » ? Cette question hante les services du ministère depuis longtemps et a donné lieu à diverses études et divers projets.

Avant d’aborder cette question, j'aimerais en poser une autre, une question de fond. Puisque le dictionnaire Robert définit la culture comme l’ensemble des connaissances acquises qui permettent de développer le sens critique, le goût, le jugement, de quoi l’individu a-t-il besoin pour cela, qu'est-ce qu'il lui est nécessaire pour comprendre les enjeux de la société, pour y devenir un acteur et pas seulement un subordonné du pouvoir ?
Qu’est-ce qui est nécessaire au peuple et qu’on appelle culture ? 

F. Kupka, "le théâtre de marionnettes (l'assiette au beurre, 1903)


Un débat public sur le rôle et la nécessité de l’action culturelle — musées, théâtre, spectacle — serait salutaire. Car, on peut considérer comme acquis que la culture est indispensable au peuple (tout comme Danton disait de l’éducation qu’elle était, « après le pain, le premier besoin d'un peuple »). Mais il faudrait expliquer ce postulat, pour le vérifier.
Questions : Quelle culture est indispensable ? le patrimoine commun ? les modes de vie des groupes humains ? l’art ? l’expression populaire ? Par ailleurs, qu’est-ce qui, dans la culture, en fait quelque chose d’indispensable ? est-ce la connaissance ? la part de spiritualité ? la possibilité de percevoir les choses autrement ? la maîtrise de notre environnement social ? la garantie de briller en société ?

Courez plus vite, les filles !

C'est ce qu'on dit depuis toujours ! comme le montrent deux films sortis en un mois, les filles courent moins vite que les gars.
(surtout quand le sol penche.)
Ah, les boulets !

L'agence, sortie 13 avril 2011
la proie, sorti 23 mars 2011

7 avril 2011

Culture pour chacun pour soi (1) - l'évolution de l'action culturelle d'État.


En septembre dernier, le Ministère de la Culture a publié un rapport qui a fait du barouf dans les milieux culturels — et au-delà. Rédigé en vue de remodeler l'action culturelle du ministère, c'est un chef-d'oeuvre d'incohérences et de vues à court terme. Signé par Guillaume Pfister et Francis Lacloche (1), il est titré "CULTURE POUR CHACUN - Programme d’actions et perspectives" .

En le lisant, on constate, comme l’ont fait nombre de citoyens et d’acteurs de la culture, que ce rapport lance des offensives contre le service public de la culture, contre les tentatives de démocratisation de la culture, et contre le savoir lui-même, taxé ici d’« élitiste ». Ce faisant, il prépare le terrain aux grosses cylindrées de l'industrie du divertissement (bouquets TV, diffuseurs, médias dominants, majors, etc.) ; c’est l’État qui célèbre ici la marchandisation des biens culturels.
Répétons-le : si le rapport débouche sur un programme, on peut s'attendre à de réelles transformations de nos habitudes de consommations, de notre rapport à l'art et au patrimoine, de nos relations aux institutions culturelles, de nos représentations sociales.
Le rapport « Culture pour chacun » est donc un texte à teneur idéologique, qui invite à entreprendre un tournant néolibéral jusque dans nos mentalités.
Mais rappelons que ce texte s’enracine dans les politiques culturelles antérieures qui sont un terreau favorable. Rappelons aussi qu’il se base sur des concepts, études, des recherches sociologiques que les auteurs ont soigneusement exploitées pour les reprendre au compte du Sarkozysme.

26 mars 2011

comment réagir à la poussée FN ?

à droite : Alexandre Gabriac, candidat FN à Grenoble
La popularité actuelle de l'extrême-droite fait naître plusieurs réactions : on entend des experts télé qui peinent à donner des explications et parlent honteusement de tentations "populistes" des masses, on entend aussi des représentants de parti dominants qui rejettent la "faute" sur le parti opposé. Et ceux qui comptent se rassurer en croyant que le vote FN est un non-vote.

Sur cette toile de fond bordélique, il y a les réactions salutaires de certains mouvements anti-fachos ou foncièrement anticapitalistes. (*)

20 mars 2011

les adolescentes ont leur mag débile. les veinardes...

"20 ans", je connaissais. "Jeune et jolie" (le mag interdit aux vieilles et aux moches), je connaissais. Mais la presse évolue et j'ai découver "Girls". Filles.

J'imagine le brainstorming chez l'éditeur de presse Bauer :
"Écoutez les gars, les petites jeunes là, elles lisent pas beaucoup nos produits. Faudrait leur pondre un titre qui les attire, autant que Closer attire leurs daronnes."
Un peu plus tard :
"Allez les gars, on boucle un 1er numéro avec des conseils beauté et conseils forme, des classements in et out, des stars et des témoignages bidon. Soyez fun et n'hésitez pas à faire dans le spectaculaire : les ados sont prêtes à vibrer, à gober n'importe quoi ! Au fait on a un titre ?
— On peut appeler ça "Girls", c'est direct et ça fait States.

19 mars 2011

la Cité des jeunes maîtres

La Cité des enfants, au sein la Cité des sciences à Paris, propose aux mômes des "activités pédagogiques", jeux et parcours et expériences pour comprendre les phénomènes physiques qui nous entourent. La Cité des enfants, espace dépendant du Ministère de la Culture, intègre peu à peu les impératifs de rentabilité : unie en 2009 au Palais de la découverte dans un même Établissement Public Industriel et Commercial, la Cité des enfants est obligée, pour maintenir son existence, d'attirer une "clientèle" payante. Avec des campagnes publicitaires qui valorisent les partenaires (médias, énergie, assurance). Ceci dit, le lieu a tant de succès qu'il faut réserver pour pouvoir y amener ses enfants.

La campagne placardée dans les panneaux publicitaire de la ville drague les mômes en faisant d'eux des maîtres. La ficelle est grosse : les enfants sont tout-puissants, illuminés, presque en état d'apesanteur ; ils remplissent l'affiche, et le texte dit : "ça grandit". Est-ce la Cité des enfants qui fait grandir ? ou bien est-ce comme dit l'expression "ah, la jeunesse, ça grandit" ?

8 mars 2011

une vaste et forte action culturelle.

On s'en rend compte depuis des semaines, quand on entre dans le hall de l'administration du Ministère de la culture : l'ampleur de la campagne pour la TNT. C'est l'action culturelle du moment, celle qui occupe le travail des chargés de missions, qui occupe même tout l'espace du hall.
Dans le hall, y a une installation avec un salon digne d'un appartement-témoin, avec des fauteuils vides tournés vers un petit écran. Et un peu épars, des panneaux avec les 2 personnages télé bleue et télé rouge, et les injonctions "tous au numérique !"


Car c'est le mot d'ordre : que toutes les télés passent au numérique pour assurer la continuité de la réception des programmes, partout, pour tous. On ne se rend pas compte à quel point c'est important.
Eh ! Imaginez que quelques uns, toujours sans TNT, soient obligés de ne plus regarder la télé, et de s'occuper ; imaginez que les jeunes soient poussés à regarder des films téléchargés illégalement au lieu de subir les programmes proposés ; imaginez que les vieux couples se mettent à lire, ou pire, à se parler ; imaginez que les vieux, soudain inoccupés, réclament la présence de leurs enfants. Imaginez que l'on ne puisse plus profiter du JT de Pujadas, de "Plus belle la vie", du magazine de Valérie Damidot, de Téléfoot, des talk-shows de Ruquier, des messages à caractère informatif pour la santé ou pour sauver la planète !
Imaginez que l'on doive, pour comprendre le monde, écouter la radio ou discuter avec nos voisins ; imaginez l'on doive de nouveau imaginer...

Pour éviter cette catastrophe, Frédéric Mitterrand s'est fait le missionnaire de l'installation de la TNT pour tous. L'accès à la télé étant pour lui "un droit légitime", il la défend comme un outil de cohésion sociale. Ouais. Passer 3h par jour en moyenne devant son écran, absorber ce qui passe, c'est s'ouvrir au monde. Notre ministre y croit, ou tente de le faire croire : "Dans une société où l'insertion sociale est complexe, où les solidarités se distendent, la télévision, en fournissant de l'information, en brisant l'isolement, joue un rôle social considérable."

Mais, Monsieur Mitterrand, il serait bien venu, pour jouer un rôle social, de renforcer le financement des centres culturels, de l'éducation populaire et du spectacle vivant, de donner les moyens d'exister aux projets novateurs et à la culture de proximité... Pour commencer, Monsieur le ministre, enterrez le rapport Pfister-Lacloche sur "la culture pour chacun", pondu en septembre dernier par vos ouailles et qui sonne le glas de la démocratisation culturelle. Oui, commencez par ça, tiens.

5 février 2011

Yves Lecoq va présenter les '"Globes de Cristal" - 7.02.11

Les Arts et la Kultur, c'est comme ça qu'on les aime : quand c'est clinquant, quand ça évolue sous les feux et les paillettes, avec des applaudisements, des entrées des artisss' , des Messieurs Loyal pour les présenter et des bimbos souriantes pour enjoliver les présentations.
Il y a des stars, des visages maquillés et souriants qui dispensent généreusement leur joie, des figures familières aux pauvres couillons que nous sommes, nous, commun des consommateurs.
On en parle dans les talk-shows du prime-time, dans les grands hebdo, dans les magazine people/télé. L'Art et la Kultur font prospérer les productions télé, les entreprises du divertissement, les majors et une certaine presse spécialisée.

26 janvier 2011

Pierre Cornette de Saint Cyr, commerçant.

Pierre Cornette de Saint Cyr est un commissaire-priseur, un de ceux qui font la pluie et le beau temps sur le paysage du marché de l'art. Après des études d'ingénieur puis de droit, il achète des dessins anciens qu'il décide de revendre, commençant ainsi une carrière de collectionneur et de commissaire-priseur. Promoteur habile, il a pu, avec son bagout et son réseau, faire de certains artistes des références.
Ayant récemment croisé sa route et entendu son témoignage lors d'une interview par une conservatrice venue avec ses collègues, j'ai réalisé combien son réseau relationnelles étaient indispensables à son succès : on comprend en l'écoutant que sur le marché de l'art, une œuvre d'art a beaucoup plus de valeur par la notoriété qu'on donne à l'artiste que par ses qualités propres.
Pierre Cornette tape sur l'épaule, tutoie, flatte, cabotine comme un habitué des mondanités, avec l'assurance propre aux puissants. Ancien sportif, il est imposant, charismatique, on sent qu'il ne doute pas. Qu'est-ce qui fait sa compétence ? sa sensibilité artistique, ou bien sa capacité pour imposer ses découvertes comme des références incontournables ?
La question est d'autant plus pertinente qu'à son niveau (c'est quand même le plus célèbre des commissaires-priseurs français !), il est difficile de discerner la limite entre la sensibilité artistique et le savoir-faire marchand.

25 janvier 2011

Guillon et Dieudonné, martyrs autoproclamés

Quand on est humoriste de métier, il est plus valorisant de se considérer comme miroir de la société (selon les mots de Guillon à propos de lui-même) que comme amuseur. Un miroir reflète la réalité, et l'humoriste semble alors investi d'une mission morale... C'est beau.
Certains humoristes, dépourvu de cette forme élevée d'humour qu'est l'autodérision, se donnent pour mission de guider le peuple, et prennent cette mission très au sérieux.
Et ceux-là, quand ils sont écartés par certaines institutions, aiment parler d'une atteinte à ce que la société a de plus précieux, la liberté...
Selon eux, les atteindre eux, c'est atteindre la société entière : scandaleux !

Ainsi Stéphane Guillon s'est fait le propre sujet même de son humour. Son fonds de commerce c'est la figure qu'il incarne : celui qu'on censure parce qu'il dit trop de vérité. La figure du rebelle, quoi. C'est d'ailleurs ainsi que sa promo le présente : le mauvais garçon pourchassé par le pouvoir.
Une forme de victimisation ? En tout cas, commercialement parlant, cela fonctionne d'autant mieux que le public aime les "impertinents", les "agitateurs" et le "politiquement incorrect".

Stéphane Guillon, à propos de Dieudonné
"Ses spectacles me dérangent : on est dans le meeting, dans la haine. Je le dis avec d'autant plus de regret que je l'ai bien connu..." Et il ajoute : "... J'ai joué chez lui, à La Main d'or. Humainement, comme dans l'écriture, il m'a beaucoup appris" (Télérama, 23.07.2009). Une chose est sûre, ils ont tous deux fini par adopter la même posture : le martyr du peuple, porteur d'une vérité qu'on veut étouffer.
Les spectacles de Stéphane Guillon, comme ceux de Dieudonné, tiennent du meeting. Ses affiches parlent.






après le spectacle "liberté surveillée" :
"liberté très surveillée"


affiches 4x3 dans le métro
en mode "aimez-moi car les puissants ne m'aiment pas"
Dieudonné, après son éviction des médias dominants, avait creusé le même sillon avec ce discours victimaire : si on m'écarte, c'est que je dis la vérité. Alors que non, c'est parce qu'il célèbre la division, le nationalisme, et qu'il vante la haine antisémite. Ses affiches tiennent le même discours.


des fausses excuses qui...
...lui donnent un statut idéal
de victime du pouvoir
Quand un humoriste oublie qu'il est un amuseur pour incarner la figure du "justicier censuré par le pouvoir," on rigole moi. Il ne parle plus du monde tel qu'il est, mais d'un monde fictif, bâti sur un ego-trip.
Avec les petits gourous du monde du spectacle,  le "miroir de la société" est toujours un miroir déformant. 

18 janvier 2011

les "patients" de l'Eglise

"Prenez Courage
Ne Craignez RIEN
Voici Notre DIEU qui Vient"

 Eglise Saint-Thomas-d'Aquin, Paris 7ème
À combien de pauvres bougres a-t-Il donné rencard ce jour-là ?

"changer de look pour retrouver un job".

Tu cherches un taf. Tu t'habilles correctement, histoire de montrer que tu es propre et que tu sais bien te présenter. Tu souris, tu te montre poli, et le patron est à moitié conquis, il reste ensuite à te montrer compétent pour le travail que tu veux.
Il y a des boulots où il faut se déguiser. Mais même pour un taf en costume de Donald à EuroDisney ou une mission de distribution de pubs pour Gysmnase Club, c'est pas à l'entretien d'ambauche que tu vas te pointer déguisé. J'espère. Tu as ton intégrité : tu ne vas quand même pas te dénaturer, t'imposer un travestissement pour les beaux yeux des employeurs.

Pourtant, certains trouvent normal qu'il faille se déguiser pour séduire l'employeur.
Si bien que  dans le quotidien gratos "20 minutes", il y avait un article titré "Nouveau look pour un nouveau travail". La Une du quotidien faisait référence à cet article : "changer de look pour retrouver un job".
Le texte parlait de relooking, de rendez-vous à un "bureau d'image", de visite chez l'exthéticienne, de coach. Autant d'investissement, pas seulement financier mais moral, pour s'adapter au marché du travail. Si l'on en croit le journal, c'est une façon de se faire "chouchouter" et de se "redonner la pêche", comme disent ces femmes, cadre sup. ou en professions libérales.

Il ne s'agit pas simplement de bien se présenter pour trouver un job, non, mais carrément "changer de look". Un look, c'est une l'affichage d'une appartenance sociale ou culturelle, une façon de dire qu'on aime ceci, qu'on se sent proche de telle sensibilité, d'une mode.


Note que l'initiative à laquelle applaudit 20 minutes est organisée par le Pôle emploi... et le fonds de dotation Ereels, dont Bernard Debré est président d'honneur et Pénélope Fillon "marraine de coeur" — là, tu comprends la vanité du machin. Le service public s'associe à un fonds d'investissement libéral, une organisation qui dit "favoriser le lien social" et dont le discours misérabiliste propose de sauver les apparences. Cette initiative, c'est l'orchestre du Titanic qui continue à jouer pour rassurer les voyageurs condamnés.

Changer de look par nécessité, pour trouver un emploi, c'est mentir sur ce qu'on représente, et d'abord c'est se faire force à soi-même : celles et ceux qui ont du se résigner à couper leurs cheveux, à enlever des piercings (ou à s'en faire poser), à cacher leurs tatouages, à porter des chaussures à talons sans en avoir l'habitude ou à mettre une cravate sans supporter cette sensation, vous parleront du serrement de coeur que ça fait.
On devrait se soumettre corps et âme à l'image qu'on attend d'un candidat ? C'est l'uniformisation assurée du monde du travail, dont font partie les demandeurs d'emploi.
Une société qui admet qu'on demande aux individus de changer leur apparence pour des raisons professionnelles, c'est une société soumise à la fois au culte du salariat comme seule construction sociale, et au culte de l'apparence.
C'est sans surprise : cette société-là, c'est la nôtre.

Fais ce qu'on te propose, suis la tendance ; et bientôt seuls les chomeurs assumés, les barmen, les ouvriers, les vendeurs de moto ou de chez H&M, auront le droit d'avoir des piercing ou des t-shirt déformés !

12 janvier 2011

Régie autonome des transports pouétiques

2011, nouvelle campagne de la régie des transports parisiens pour souhaiter "une année pleine de poésie" aux usagers. Loin de moi l'idée de faire du mauvais esprit en spéculant sur le prix de cette campagne — payée par ces usagers, qui doivent compenser le manque à gagner de l'absence de pub sur ces "mobiliers urbains" de Métrobus — ce serait mesquin.
Je ne dirai donc rien de l'aspect financier : ce sont les messages placardés qui me font réagir.
On voit, sur un fond blanc, des bulles de couleur vives et des petits personnages ultra stylisés : on est chez les Barbapapa. Dans les plus grandes bulles, les "voeux de la RATP", sous forme de petites phrases issues de poèmes d'auteurs célèbres.



11 janvier 2011

Analyse d'une pub d'Areva, par Terra-éco

Le site Terra-Eco démonte avec talent la nouvelle propagande d'Aréva, et décrypte tous les symboles que véhicule ce clip presque sans texte.

pour voir la pub Areva

... Une "épopée de l'énergie" selon laquelle 'il y a des énergies du passé (vent et bois) et des énergies modernes comme le nucléaire ; que le nucléaire est une énergie renouvelable ; qu'Areva est propre, pop, fun, techno ; et que le progrès conduit à une fête de jeunes sur le toit d'un immeuble en bord de mer.

La propagande est d'autant plus intense qu'elle consiste à réaliser un making-of de la pub, un autre niveau de spectacle qui fait passer la réalisation du clip pour une prouesse encadrée par des "experts", et donne une caution familière à Areva.
Le secrets du tournage seront bientôt à la télé : dans les pages pub ou dans les magazines cinéma ?

Le décryptage est signé Arnaud Gossement et c'est ici.

5 janvier 2011

Nicolas Bacchus cire sa canne !!!

Nicolas Bacchus vient de sortir son nouveau disque, "la verVe et la Joie". Ben vous savez quoi ? Yeah !!!

crédit : P. Matsas
Le précédent, "à table (chansons bleues ou à poing)", un autre très chouette disque placé sous le signe du désir et de la gastronomie, réunissait Juliette, Eric Toulis, Debout sur le Zinc. On peut écouter quelques chansons de ce disque ici, sur le site de Kiui Prod

Cette fois-ci avec "la verVe et la Joie", il convie Agnès Bihl, Patrick Font, Sarcloret, Anne Sylvestre, Lucas Rocher, Thomat Pitiot et Manu Galure pour des compositions paroles & musique, et Vladimir Vissotski dont il fait une superbe reprise.

Ce disque est une petite merveille savamment taillée, pleine de colère et d'amour, de désir et de gourmandise. J'y sens les esprits de Ferrat, Thiéfaine, Gérard Morel, Bérurier Noir, Brassens, Font & Val, Sarclo, Barbara, Michèle Bernard, Brecht & Weill... Enfin, c'est ce que moi j'y vois. Mais le plus admirable chez Bacchus, c'est pas les influences, c'est son verbe à lui, ironique, ludique mais sans détour, et son humour, spirituel même dans le potache. Il soigne avec délice les formules, contrepèteries (ah oui, au fait, le titre de mon article en est une !) et double-sens. Et le tout sur des compositions (très) originales.
On retrouve les thèmes qu'il explore depuis des années : l'inspiration libertaire ("les gens de mon pays") et le souffle libertin, l'homosexualité hors du ghetto ("Ce que je fais de moi"), la gastronomie et d'autres plaisirs, une poésie vive, des tranches de vies pleine d'ironie (la magnifique "Cousine" ; "la Pierrette à Pigalle"), et de salutaires et chaleureuses offensives contre la frilosité morale qui envahit notre pays — aaah, l'immense plaisir d'entendre à nouveau la verve de Patrick Font sur la chanson "identité nationale (les métèques)", sur une mélodie gentiment piquée à Moustaki !

Je peux vous dire que l'écoute des chansons m'a vraiment fait plaisir : une chanson après l'autre, ça m'a ému, ça m'a fait rire, ça m'a scié : le bonhomme ne manque ni de talent ni de profondeur (et ses amis non plus).

Pour ce qui est de la production — il s'agit en partie d'une autoproduction "Bacchanales productions" —, elle est nickel, avec des arrangements riches, parfois touffus même, et variés.
Passé le regard sur la pochette qui ne laisse pas présager des chansons, le disque tout entier est un bijou grenat, acéré et tendre. C'est quand même rare, les chanteurs nourrissants, qui nous emplissent à ce point d'une joyeuse ironie. C'est rare, enfin, les artistes debout.

Toutes les infos sur Nicolas Bacchus, sur son site (pas toujours à jour, mais on peut pas tout faire à la fois).


Attention, le disque sera bientôt dans les bacch' : c'est prévu pour fin janvier.