14 août 2009

Idriss Deby le despote, considéré par le presse bourgeoise française comme "bâtisseur au service de son pays"

Ce mois-ci, le magazine l'Essentiel des relations internationales, appartenant aux éditions Prestige Communication fait la une sur Idriss Deby, un bâtisseur au service de son pays. Il se focalise sur la croissance exemplaire, sur les bonnes relations entretenues avec l'international... Qui faut-il être pour diffuser de telles inepties ?
Prestige Comm' est une maison d'édition parisienne et édite 4 revues thématiques : Vivre Zen (Santé, bien être), The Luxury (guide hôtels, spa, golfs), l'Essentiel des relations internationales (politique, économie, société, culture) et le Club Cigare. Tu vois le genre...
Prestige Comm' s'adresse à cette grande bourgeoisie qui n'attend que d'être rassurée sur ses intérêts, sur ses valeurs, et qui espére que de bons Africains continueront à faire marcher le bizness comme avant les indépendances !
Rappelons un numéro spécial de L’essentiel des relations internationales de 2007, entièrement à la gloire d’Omar Bongo. Celui-ci y était présenté comme un "négociateur hors pair ", président d’un pays "à la croissance exemplaire".

C'est grave. Idriss Deby Itno est un despote, qui règne depuis 1990 sur le Tchad, au service de lui-même d'abord, de sa famille, de ses proches, de son ethnie (Zaghawas)... Après le coup d'état que la France l'a aidé à mener contre le dictateur Hissène Habré, Deby, ancien élève de l'Ecole militaire de Paris, a instauré une république bananière. Chaque scrutin (1996, 2001, 2005) est le fruit de fraudes, agrémenté du financement de candidatures fictives et de manipulations de la Constitution. Je me souviens de vidéos-pirates, montrant des soldats tchadiens sortir en courant des bureaux de votes, les urnes pleines de bulletins dans les bras, sous les huées de la foule scandalisée.

L'appui de la France, c'est l'opération Épervier, dispositif en place depuis 1986 pour chasser les troupes libyennes, puis, depuis 1991, maintenu sur place sans aucune autre raison que de défendre le régime de Deby et les intérêts français. Epervier, ça a été jusqu'à 12000 soldats sur place (et aujourd'hui 1200).
La France poursuit la politique dite de "Françafrique" (comme dans d'autres anciennes colonies) où l'implantation d'autorités françaises et le soutien aux régimes en place pourvoit l'Hexagone en matières premières, en pétrole, en uranium, etc. Un système de soutien mutuel qui profite à notre pays et lui permet de rayonner au niveau international. Le système a été crée par De Gaulle par l'intermédiaire de Jacques Focart, de qui Pasqua avait pris le relais. Au Tchad, c'est un soutien politique et militaire inconditionnel au régime illégitime, notre pays armant le gouvernement de Deby contre l’opposition démocratique et la population en général.

La France offrit un silence complaisant lors de l'assassinat, en 1992, du Vice-Président de la Ligue tchadienne des Droits de l'Homme, Me Joseph Behidi ; lors de l'annulation d'une grande partie des mesures du plan d'assainissement, en 1993 (occasionnant des milliers de morts) ; lors du massacre des populations de Goré en 1995 (247 morts), et tant d'autres méfaits.
En 1993, Amnesty International dressait le bilan amer des trois premières années du régime Déby :
" La terreur règne toujours. On continue de repêcher des cadavres dans les eaux du Chari, le fleuve qui arrose N'Djaména. Plus de 800 personnes ont été exécutées de façon extra-judiciaire. [...] Quels que soient ses mots d'ordre, le gouvernement de Idriss Déby utilise aujourd'hui les méthodes de répression dont il disait vouloir débarrasser son pays à l'époque où il luttait contre le régime de Hissène Habré. Les assassins, les tortionnaires, les ravisseurs qui sévissent au Tchad appartiennent aux forces de sécurité de Idriss Déby ".
En 1996, l'organisation constate la banalisation de la torture et notamment le recours à l'arbatachar (les amateurs du bondage extrême connaissent peut-être cette forme de torture locale).
Deby règne en despote, réprimant les nombreuses rébellions (en 2000, on estimait à 25 000 morts le nombre de victimes du régime), appelant la France à l'aide lorsque son pouvoir est menacé — la France intervient en 2006 pour débarrasser le Tchad des troupes rebelles sur le point de prendre le pouvoir, et permet le retour du bon président Deby, en déplacement en Guinée Equatoriale.
Et ça continue : chasses aux sorcières, intimidations et séquestrations de journalistes, enlèvements d'opposants politiques. Et c'est cet homme, ce despote assassin, que L'essentiel des relations internationales décrit comme un bâtisseur au service de son pays.

Honte à l'Essentiel des relations internationales pour le peuple tchadien, honte pour les victimes de celui que vous portez aux nues, honte pour le soutien de ce journal à une dictature

Infos supplémentaires :

10 août 2009

GOLEM - de Jiri Barta

Jiri Barta, un Tchèque né en 1948 à Prague, a réalisé plusieurs films d'animation, dans la tradition tchèque pour le dessin et la technique, mais avec plein d'innovations et de mystères. Comme Jan Svankmajer, autre réalisateur de films d'animation qui m'a beaucoup marqué, il mêle les matériaux, leur donne une expressivité étonnante, et met en scène des légendes. Son "joueur de flûte de Hamelin" (un conte médiéval allemand) est superbe.
Là, je vous fais partager le travail préparatoire d'un film jamais réalisé entièrement : Golem. Ca date de 1996, c'est donc récent dans la carrière de Barta, et on peut voir cette merveille ici :
http://www.youtube.com/watch?v=ZcJFhiQMB8I