8 septembre 2012

le grand artiste Ben : "je vous chie à la raie"

Qu'est-ce qui permet de dire d'une oeuvre que c'est de l'art ? parfois, c'est pas facile, pas facile, d'autant que des mouvements de pensée du XXème siècle ont balayé les idées et ont brouillé les cartes. Du coup, il arrive couramment qu'on fasse passer de l'art pour du simple savoir-faire, et du divertissement pour de l'art, des artistes pionniers ou marginaux pour des casse-couilles, et des bonimenteurs à sensations pour des artistes !

Certains artistes n'ont pas eu trop de scrupules à usurper le titre d'artiste quand ils n'ont fait que mettre en forme les désirs d'un public, faire du buzz, un peu comme ces bons maquettistes ou ces bons dessinateurs qui bossent dans la pub : ils sentent l'air du temps, flattent la masse, se mettent au frais, et ils prospèrent.

Tout ça pour dire quoi ? Tout ça pour parler de "Ben", Benjamin Vautier, quoi.
"Ben", ce gros jovial qui connaissait plein de monde dans le milieu arty des années 60 et qui a été aux débuts du mouvements Fluxus ; cet artiste, euh, cet opportuniste qui accumule des objets de consommation courante pour en faire des installations trop stylées.

"Ben", qui écrit des gentilles petites phrases, avec cette typographie hyper-reconnaissable d'une ado rebelle.
"Ben", qui, avec un sourire entendu de crétin arrogant, proclamait que "tout est art"  (la vie, les objets de consommations, des sons et images aléatoires, des hurlements, les publicités), et qui a en tiré — avec tout l'aplomb qu'il faut à un dealer pour clamer que la coke est bonne pour la tension — un statut d'artiste.

"Ben", qui, 40 ans après ses installations à succès, 40 ans à répéter son dispositif et à prospérer au Centre Pompidou, s'est forgé une image de marque rentable. Et qui fait les pubs pour des chaînes hôtelières, des sociétés immobilières, du matos d'écolier. "Ben", dont les marques achètent la célébrité, et qu'on charge de créer de la familiarité pour rendre un produit plus vendeur.










Et bien, "Ben" se vend aussi dans le service public : dans un grand hôpital parisien, on trouve de grands tableaux de "Ben" avec des injonctions à po-si-ti-ver. "Je vis" est-il placardé en grand format dans les espaces d'accueil.





C'est-y une gentille façon de dire que, même malade, même hospitalisé, même grabataire, on vit ? qu'on n'est pas mort et que c'est super ?
Ou est-ce un message de l'artiste qui nous rappelle que plus les services publics achètent ses conneries, plus il vit mieux ?


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