26 janvier 2011

Pierre Cornette de Saint Cyr, commerçant.

Pierre Cornette de Saint Cyr est un commissaire-priseur, un de ceux qui font la pluie et le beau temps sur le paysage du marché de l'art. Après des études d'ingénieur puis de droit, il achète des dessins anciens qu'il décide de revendre, commençant ainsi une carrière de collectionneur et de commissaire-priseur. Promoteur habile, il a pu, avec son bagout et son réseau, faire de certains artistes des références.
Ayant récemment croisé sa route et entendu son témoignage lors d'une interview par une conservatrice venue avec ses collègues, j'ai réalisé combien son réseau relationnelles étaient indispensables à son succès : on comprend en l'écoutant que sur le marché de l'art, une œuvre d'art a beaucoup plus de valeur par la notoriété qu'on donne à l'artiste que par ses qualités propres.
Pierre Cornette tape sur l'épaule, tutoie, flatte, cabotine comme un habitué des mondanités, avec l'assurance propre aux puissants. Ancien sportif, il est imposant, charismatique, on sent qu'il ne doute pas. Qu'est-ce qui fait sa compétence ? sa sensibilité artistique, ou bien sa capacité pour imposer ses découvertes comme des références incontournables ?
La question est d'autant plus pertinente qu'à son niveau (c'est quand même le plus célèbre des commissaires-priseurs français !), il est difficile de discerner la limite entre la sensibilité artistique et le savoir-faire marchand.

25 janvier 2011

Guillon et Dieudonné, martyrs autoproclamés

Quand on est humoriste de métier, il est plus valorisant de se considérer comme miroir de la société (selon les mots de Guillon à propos de lui-même) que comme amuseur. Un miroir reflète la réalité, et l'humoriste semble alors investi d'une mission morale... C'est beau.
Certains humoristes, dépourvu de cette forme élevée d'humour qu'est l'autodérision, se donnent pour mission de guider le peuple, et prennent cette mission très au sérieux.
Et ceux-là, quand ils sont écartés par certaines institutions, aiment parler d'une atteinte à ce que la société a de plus précieux, la liberté...
Selon eux, les atteindre eux, c'est atteindre la société entière : scandaleux !

Ainsi Stéphane Guillon s'est fait le propre sujet même de son humour. Son fonds de commerce c'est la figure qu'il incarne : celui qu'on censure parce qu'il dit trop de vérité. La figure du rebelle, quoi. C'est d'ailleurs ainsi que sa promo le présente : le mauvais garçon pourchassé par le pouvoir.
Une forme de victimisation ? En tout cas, commercialement parlant, cela fonctionne d'autant mieux que le public aime les "impertinents", les "agitateurs" et le "politiquement incorrect".

Stéphane Guillon, à propos de Dieudonné
"Ses spectacles me dérangent : on est dans le meeting, dans la haine. Je le dis avec d'autant plus de regret que je l'ai bien connu..." Et il ajoute : "... J'ai joué chez lui, à La Main d'or. Humainement, comme dans l'écriture, il m'a beaucoup appris" (Télérama, 23.07.2009). Une chose est sûre, ils ont tous deux fini par adopter la même posture : le martyr du peuple, porteur d'une vérité qu'on veut étouffer.
Les spectacles de Stéphane Guillon, comme ceux de Dieudonné, tiennent du meeting. Ses affiches parlent.






après le spectacle "liberté surveillée" :
"liberté très surveillée"


affiches 4x3 dans le métro
en mode "aimez-moi car les puissants ne m'aiment pas"
Dieudonné, après son éviction des médias dominants, avait creusé le même sillon avec ce discours victimaire : si on m'écarte, c'est que je dis la vérité. Alors que non, c'est parce qu'il célèbre la division, le nationalisme, et qu'il vante la haine antisémite. Ses affiches tiennent le même discours.


des fausses excuses qui...
...lui donnent un statut idéal
de victime du pouvoir
Quand un humoriste oublie qu'il est un amuseur pour incarner la figure du "justicier censuré par le pouvoir," on rigole moi. Il ne parle plus du monde tel qu'il est, mais d'un monde fictif, bâti sur un ego-trip.
Avec les petits gourous du monde du spectacle,  le "miroir de la société" est toujours un miroir déformant.