31 octobre 2010

Féminité dans la pub : Femmes ouvertes, prêtes à consommer


Aviez-vous déjà remarqué ?

Joyce Jonathan / Higelin ; 2 concerts
Sinik ft Vitaa

TBM: plus suggestif que Très Bon Marché


le mag "Polka"
Pietragalla "la tentation d'Eve"



C'est pourtant presque systématique, sur les affiches de pubs, affiches de concerts, de films, photos de mode, couvertures de journaux féminins... : les femmes posent les lèvres entr'ouvertes, dans une posture d'invitation explicite (ça ne se conçoit pas pour les hommes, qui généralement montrent un visage fermé et une bonne gueule volontaire.)

On sait combien la publicité use d'attraction sexuelle : on se rappelle la pub des années 90, qui disait : "il a une Audi, il aura la femme". Le boulot des publicitaires c'est ça : conférer au produit une charge érotique.

"L'irrépressible 'pulsion consommatrice', ne se suffisant pas des biens matériels, a besoin pour s'assouvir de multiplier à l'infini les 'biens symboliques' ", explique François Brune (*).



Avant la seconde guerre mondiale, on cantonnait les femmes à certains rôles féminins : "la maman" rassurante, fondatrice de foyer. Elle apparaissait sur les affiches de films ou de propagande, docile, aimante et tendre avec ses rejetons. Laborieuse quand elle était prolétaire, fragile dans les classes aisées. Selon la distribution traditionnelle des rôles, les hommes sont des combattants et des maîtres, les femmes sont dans le domaine du sensible.
 Lorenz Kellner, pédagogue allemand, écrivait en 1852 : "Dans le cercle familial c’est le plus souvent la mère, faible, qui défend le principe philanthropique, tandis que le père, dans sa nature abrupte, exige l’obéissance absolue (...) c’est la raison pour laquelle il est à la tête de l’ensemble, et donne à l’esprit qui y préside son orientation".

Depuis les années 1950, les hommes au pouvoir ont proposé des modèles féminins plus sexualisés dans l'iconographie collective : l'allumeuse, l'aguicheuse, le sexe faible mais source de plaisir. On affichait les femmes avec tout un tas d'attitudes pour qu'elles paraissent plus désirable : les lèvres entr'ouvertes comme des poupées disponibles, des objets consommables.
 
Je fais ce constat aujourd'hui, alors que notre société est encore très hétéronormée et patriarcale. Je fais ce constat à une époque où la grande majorité des affiches et des pubs sont encore conçues par des hommes.

mag "Penthouse"
Ces postures de femmes prêtes à consommer, on les retrouve en effet partout, dans les attitudes qu'on exige de la part des hôtesses, des comédiennes, des performeuses porno, des mannequins, quels que soient les fins commerciales... jusqu'aux campagnes de prévention sanitaires !


 

Un cas d'école sur les affiches de cinéma ? On y voit ça : les hommes, en fermant la bouche avec un air arrogant, expriment la détermination, l'arrogance et l'action ; les femmes, en ouvrant les lèvres, expriment la langueur, l'inquiétude, l'émoi, la fragilité.

I. Le Besco filmée par son gardien
"Secret défense"

"the Town"

"Invasion"
James Bond & une "James Bond girl" (seul le modèle change)
 

Le cas extrême : on demande à des petites filles de jouer la langueur sexuelle, sans qu'elles puissent discuter de la signification de ces mises en scène.
 
Ces modèles de femmes prêtes à consommer remplissent l'espace public. Chaque jour on en croise des dizaines, des modèles si banalisés qu'on ne remarque plus ce qui peut être acceptable ou non, et qu'on intègre des normes sans en avoir conscience.
 
façon Christine Lagarde
Les seules femmes qu'on représente de façon moins sexuée (donc en fermant la bouche) sont : les mamans, les mamies ou les conseillères de banque. Celles-là doivent être pro, fiables, pas sexy — sinon ça desservirait la cause. Donc souriez les mamies, mais avec l'air sobre !

Partout ailleurs règne le modèle de la femme "ouverte".


Alors c'est vrai, les mœurs et les mentalités changent. Dans les représentations collectives, on commence à voir des hommes s'occuper des mouflets et des active women à la tête de Veolia.
Mai la publicité a toujours besoin d'objets dérivés du désir, et use toujours d'archétypes sexuels. Le jour où le monde de la pub cessera d'afficher les femmes avec la bouche ouverte, on cessera peu à peu de les réduire à des objets de désirs.


* François Brune, professeur et écrivain, est fondateur du RAP, Résistance à l'agression publicitaire

5 commentaires:

  1. Voir aussi http://www.entrailles.fr/index.php?post/Le-syndrome-de-la-bouche-ouverte

    RépondreSupprimer
  2. j'aurais dû me douter que dans les Entrailles on avait déjà remarqué ça !

    RépondreSupprimer
  3. ça me met hors de moi de voir ça, surtout qu'on prétend que la femme est libérée. Alors qu'aujourd'hui son seul droit c'est de montrer son ***.Le pire c'est qu'elles aiment ça!!!

    RépondreSupprimer