25 janvier 2011

Guillon et Dieudonné, martyrs autoproclamés

Quand on est humoriste de métier, il est plus valorisant de se considérer comme miroir de la société (selon les mots de Guillon à propos de lui-même) que comme amuseur. Un miroir reflète la réalité, et l'humoriste semble alors investi d'une mission morale... C'est beau.
Certains humoristes, dépourvu de cette forme élevée d'humour qu'est l'autodérision, se donnent pour mission de guider le peuple, et prennent cette mission très au sérieux.
Et ceux-là, quand ils sont écartés par certaines institutions, aiment parler d'une atteinte à ce que la société a de plus précieux, la liberté...
Selon eux, les atteindre eux, c'est atteindre la société entière : scandaleux !

Ainsi Stéphane Guillon s'est fait le propre sujet même de son humour. Son fonds de commerce c'est la figure qu'il incarne : celui qu'on censure parce qu'il dit trop de vérité. La figure du rebelle, quoi. C'est d'ailleurs ainsi que sa promo le présente : le mauvais garçon pourchassé par le pouvoir.
Une forme de victimisation ? En tout cas, commercialement parlant, cela fonctionne d'autant mieux que le public aime les "impertinents", les "agitateurs" et le "politiquement incorrect".

Stéphane Guillon, à propos de Dieudonné
"Ses spectacles me dérangent : on est dans le meeting, dans la haine. Je le dis avec d'autant plus de regret que je l'ai bien connu..." Et il ajoute : "... J'ai joué chez lui, à La Main d'or. Humainement, comme dans l'écriture, il m'a beaucoup appris" (Télérama, 23.07.2009). Une chose est sûre, ils ont tous deux fini par adopter la même posture : le martyr du peuple, porteur d'une vérité qu'on veut étouffer.
Les spectacles de Stéphane Guillon, comme ceux de Dieudonné, tiennent du meeting. Ses affiches parlent.






après le spectacle "liberté surveillée" :
"liberté très surveillée"


affiches 4x3 dans le métro
en mode "aimez-moi car les puissants ne m'aiment pas"
Dieudonné, après son éviction des médias dominants, avait creusé le même sillon avec ce discours victimaire : si on m'écarte, c'est que je dis la vérité. Alors que non, c'est parce qu'il célèbre la division, le nationalisme, et qu'il vante la haine antisémite. Ses affiches tiennent le même discours.


des fausses excuses qui...
...lui donnent un statut idéal
de victime du pouvoir
Quand un humoriste oublie qu'il est un amuseur pour incarner la figure du "justicier censuré par le pouvoir," on rigole moi. Il ne parle plus du monde tel qu'il est, mais d'un monde fictif, bâti sur un ego-trip.
Avec les petits gourous du monde du spectacle,  le "miroir de la société" est toujours un miroir déformant. 

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